PROPOSITION DE RÉSOLUTIONsur le livre blanc sur l’avenir de la défense européenne
5.3.2025-()
conformément à l’article136, paragraphe2, du règlement intérieur
Reinier VanLanschot, Mārtiņš Staķis, Ville Niinistö, Damian Boeselager, Hannah Neumann, Maria Ohisalo, Sergey Lagodinsky, Virginijus Sinkevičius
au nom du groupe Verts/ALE
Voir aussi la proposition de résolution communeRC-B10-0146/2025
10‑0147/2025
Résolution du Parlement européen sur le livre blanc sur l’avenir de la défense européenne
()
Le Parlement européen,
–vu ses résolutions antérieures sur la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine,
–vu sa recommandation du8juin2022 au Conseil et au vice-président de la Commission/haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité sur la politique étrangère, de sécurité et de défense de l’Union européenne après la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine[1],
–vu la charte des Nations unies,
–vu la boussole stratégique en matière de sécurité et de défense adoptée par le Conseil le21mars2022,
–vu le rapport de Sauli Niinistö, conseiller spécial de la présidente de la Commission européenne, du 30 octobre 2024, intitulé «Safer Together – Strengthening Europe’s Civilian and Military Preparedness and Readiness»,
–vu l’article136, paragraphe2, de son règlement intérieur,
A.considérant que la présidente de la Commission européenne a chargé le commissaire à la défense et à l’espace et la haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité de présenter un livre blanc sur l’avenir de la défense européenne;
B.considérant que le Parlement et les experts demandent l’élaboration d’un livre blanc sur la défense depuis plus d’une décennie;
C.considérant que la boussole stratégique a été principalement élaborée et négociée avant le 24 février 2022; que la boussole stratégique est une stratégie très large qui fournit peu d’orientations quant à la nécessité urgente d’assurer la préparation de la défense et de fournir des capacités de dissuasion et de défense pour faire face aux urgences militaires les plus pressantes;
D.considérant qu’il est urgent de renforcer le contrôle parlementaire de la défense européenne afin de garantir une base démocratique solide pour ce domaine d’action crucial;
E.considérant que les acteurs industriels européens de la défense sont non seulement confrontés à des défis, mais ont également pu profiter d’une demande beaucoup plus élevée de produits de défense depuis février 2022, ce qui a généré des bénéfices record, en particulier pour les maîtres d’oeuvre;
F.considérant que les jeunes entreprises et les petites et moyennes entreprises (PME) innovantes dans le domaine de la défense et à double usage n’ont pas été en mesure de tirer profit de manière comparable des fonds de l’Union ou des commandes et des financements des gouvernements nationaux par rapport aux maîtres d’oeuvre;
G.considérant que les efforts combinés des États membres de l’Union en matière de dépenses militaires dépassent déjà ceux de la Russie, mais souffrent d’un manque d’économies d’échelle et de concentration, ce qui souligne la nécessité d’une plus grande efficacité et d’une rationalisation des dépenses militaires, en plus de la nécessité de nouveaux investissements;
H.considérant que les nombreuses recommandations concrètes contenues dans le rapport Niinistö devraient guider les travaux sur le livre blanc, notamment parce que le rapport présente une approche globale et complète de la préparation qui englobe tous les aspects civils et militaires; que le rapport souligne que l’Union n’a pas de plan sur ce qu’il convient de faire en cas d’attaque armée contre un État membre et que l’Union ne dispose actuellement pas de la capacité globale de rassembler toutes ses ressources nécessaires de manière par-delà les cloisonnements institutionnels et opérationnels;
I.considérant que les menaces hybrides sont conçues pour fonctionner dans la zone grise entre la paix et la guerre, combinant des méthodes conventionnelles et non conventionnelles telles que le sabotage, l’espionnage et l’infiltration politique afin de saper la stabilité et la résilience de l’Union; que les cyberattaques sont devenues un élément central de ces campagnes, tirant parti de la numérisation croissante de secteurs critiques tels que les soins de santé, la finance et l’énergie, provoquant des perturbations en cascade susceptibles d’avoir de graves conséquences économiques et sociétales; que la manipulation de l’information et l’ingérence étrangères complètent ces opérations par la diffusion de désinformation et de propagande afin d’éroder la confiance dans les institutions démocratiques et de polariser l’opinion publique; que la complexité, la fréquence et l’intensité croissantes de ces menaces mettent en lumière la nécessité urgente d’identifier et d’appliquer des solutions efficaces pour préserver la sécurité et la résilience de l’Union;
J.considérant que la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine constitue un signal d’alarme pour l’Union, présente une menace immédiate pour l’architecture de sécurité européenne et mondiale ainsi que pour la sécurité de l’Union et de ses États membres; que ce conflit démontre qu’il est urgent pour les États membres de définir une perception commune des menaces et de faire preuve d’une véritable solidarité envers les États membres qui sont en première ligne;
K.considérant que la capacité de l’Union à prendre des mesures décisives en réponse aux menaces extérieures a été entravée à plusieurs reprises par l’exigence d’unanimité, certains États membres bloquant ou retardant l’aide militaire essentielle à l’Ukraine et portant ainsi atteinte à la sécurité européenne;
L.considérant que l’administration Trump propose une normalisation des liens avec la Russie et a menacé de retirer l’armée américaine du continent européen; qu’il apparaît que l’administration américaine a cessé d’être un allié fiable au sein de l’OTAN, ce qui a des répercussions négatives sur la défense territoriale collective de ses membres;
1.souligne la gravité des menaces pesant sur la sécurité du continent européen, qui ont atteint un niveau sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale; exprime sa profonde inquiétude face à la montée des fractures géopolitiques, y compris en Occident, aux ambitions de domination impérialiste nouvelles et renouvelées des puissances autoritaires, à la rivalité systémique entre les grandes puissances, à l’unilatéralisme nationaliste, au recours à la force et à la violence comme méthode principale et croissante de certains acteurs étatiques et non étatiques pour promouvoir leurs intérêts politiques et économiques ou résoudre des différends;
2.rappelle que l’Union est un projet de paix et qu’elle devrait s’efforcer de parvenir à la paix et à la stabilité tout en condamnant l’agression; souligne que, pour parvenir à la paix et à la stabilité, nous devons soutenir l’Ukraine et devenir plus résilients;
3.estime que la guerre d’agression contre l’Ukraine faisait partie du plan de Poutine visant à remodeler l’architecture de sécurité euro-atlantique et que ce plan a été mis en échec grâce à la défense héroïque du peuple ukrainien;
4.souligne que les actes russes de sabotage contre des infrastructures européennes critiques, ainsi que la manipulation et l’ingérence de la Russie dans les pays de l’Union et de l’OTAN, se sont considérablement accrus; souligne que les experts estiment que la Russie pourrait encore intensifier ses actes agressifs et se livrer à une attaque contre les États membres de l’Union avec des forces armées conventionnelles au cours des prochaines années;
5.déplore que le président des États-Unis ait laissé entendre que les États-Unis pourraient tenter d’annexer le Groenland, ce qui serait contraire au droit international, créerait une instabilité considérable pour le gouvernement et la population groenlandais ainsi que pour l’ensemble de la région, aggravant encore la détérioration des relations au sein de l’Alliance atlantique;
6.demande par conséquent à l’Union d’intensifier ses efforts pour modifier la trajectoire de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine et de mettre en place les conditions d’une paix juste, globale et durable selon les modalités de l’Ukraine; souligne que la défaite de la Russie en Ukraine et la garantie du succès futur de l’Ukraine sont les investissements les plus efficaces et les plus rentables dans la sécurité européenne à court et moyen terme;
7.presse les États membres de fournir davantage d’armes et de munitions à l’Ukraine, en quantités aussi importantes et aussi rapidement que possible, afin de permettre à l’Ukraine de libérer son territoire et de décourager de nouvelles attaques russes;
8.demande qu’une augmentation rapide et significative du financement du soutien militaire à l’Ukraine soit une composante essentielle et structurelle du livre blanc; invite les États membres à accroître les investissements directs dans la capacité de l’industrie ukrainienne de la défense à produire en masse des produits de défense essentiels (modèle danois), en particulier les drones, les systèmes de défense aérienne, l’artillerie et les capacités de frappe à longue distance; propose d’allouer un budget spécifique de plusieurs milliards d’euros à l’instrument de soutien à l’Ukraine, dans le cadre du programme pour l’industrie européenne de la défense (EDIP), strictement réservé à cette fin; souligne la nécessité d’explorer des voies juridiques pour opérer une saisie totale des avoirs gelés des ressortissants russes et de la Banque centrale russe en vue de les utiliser comme subventions pour les dépenses de l’Ukraine, consacrées à ses besoins en matière de défense et de résilience et à sa reconstruction, conformément au droit international; condamne le veto imposé par le gouvernement hongrois à la facilité européenne pour la paix (FEP), qui bloque plus de 6milliards d’euros et rend la FEP presque inutile; souligne en outre qu’il est urgent d’envisager également la possibilité de créer un autre dispositif ad hoc pour les pays européens qui souhaitent soutenir militairement l’Ukraine et financer cette aide conjointement;
9.demande d’inclure dans le livre blanc un plan qui décrit comment l’intégration de l’industrie ukrainienne de la défense dans la base industrielle et technologique de défense de l’Union (BITDE) peut être mise en œuvre de la manière la plus rapide et la plus efficace possible; rappelle qu’il est urgent de financer correctement l’instrument ukrainien de l’EDIP; propose en outre de fournir une assurance de guerre pour les projets essentiels de la BITDE en Ukraine; propose d’inviter régulièrement des fonctionnaires du ministère ukrainien de la défense ayant le statut d’observateurs aux réunions des formations concernées du Conseil;
10.attend du livre blanc sur la défense de l’Union qu’il définisse un nouveau cadre et détermine la portée de la préparation de l’Union en matière de défense, et qu’il prépare l’Union, face aux éventualités militaires les plus graves, à dissuader les agresseurs potentiels, à se défendre et également à aider les alliés de l’OTAN qui sont également des États membres de l’Union à devenir un pilier européen crédible au sein de l’OTAN;
11.souligne que le moment est venu d’utiliser le processus du livre blanc pour définir clairement ce qu’il faut entendre par une véritable union européenne de la défense; rappelle que l’adoption de la boussole stratégique n’a constitué qu’un point de départ, mais que sa mise en œuvre reste nécessaire et appelle une mise à jour pour tenir compte des objectifs de dissuasion et de préparation en matière de défense;
12.déplore la réticence du Conseil et des États membres de l’Union à relever les grands défis structurels du paysage industriel européen de la défense et le manque d’ambition en ce qui concerne la coopération entre leurs forces armées au niveau de l’Union; invite les États membres à unir leurs forces et à soutenir une avancée décisive vers un cadre de défense très ambitieux et complet;
13.se félicite, dans le principe, des annonces faites par la présidente de la Commission le 4 mars 2025 concernant une initiative «réarmer l’Europe»; souligne toutefois que les investissements prévus devraient remédier au manque de coopération et de coordination entre les États membres, y compris par des mesures qui garantissent une interopérabilité totale et érigent en règle la passation conjointe de marchés;
14.invite instamment la Commission, la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité (VP/HR) et les États membres à utiliser le processus du livre blanc pour définir un cadre global composé au moins des éléments clés suivants:
a)une description précise des scénarios dans lesquels l’UE et ses États membres utiliseraient des instruments militaires et de sécurité qui intègrent les dernières évaluations des risques et des menaces et dont la portée s’étend des éventualités militaires les plus extrêmes à la gestion des crises à l’étranger,
b)les éléments d’une doctrine militaire qui décrivent en détail les tâches militaires liées aux différents scénarios, y compris la coopération avec l’OTAN, notamment par une mise en œuvre plus précise et des exercices de routine pour les scénarios visés à l’article 42, paragraphe 7, du traité sur l’Union européenne (traité UE),
c)les grands objectifs militaires révisés et adaptés, étroitement coordonnés avec le processus de planification de la défense de l’OTAN, et une description précise de la quantité et de la qualité nécessaires du personnel militaire, y compris les besoins en matière de formation et les capacités militaires essentielles pleinement synchronisées avec le nouveau modèle de forces de l’OTAN en ce qui concerne les pays de l’Union qui sont membres de l’OTAN, tels que les catalyseurs stratégiques, mais aussi les stocks de munitions, afin d’atteindre les objectifs actuels en matière de constitution des forces,
d)des propositions concernant les structures de coopération des forces armées qui vont au-delà des arrangements ad hoc, telles que les groupements tactiques de l’UE, y compris une capacité de déploiement rapide (CDR) renforcée, des capacités stratégiques au niveau de l’UE dotées de ressources humaines multinationales (sur la base du modèle du système aéroporté de détection et de contrôle – AWACS) et des unités militaires multinationales permanentes supplémentaires dotées de capacités suffisantes pour assurer la dissuasion et la défense,
e)une description des paramètres clés nécessaires à la mise en place d’un marché unique de la défense efficace et compétitif qui aiderait les États membres à atteindre les grands objectifs en matière de capacités nécessaires à une préparation totale en matière de défense et à équiper nos alliés les plus proches, tels que l’Ukraine;
15.fait valoir que l’Union doit adopter une approche globale et horizontale de la sécurité et de la défense en tenant compte des nombreux défis sociétaux et systémiques auxquels elle est confrontée, tels que le changement climatique; souligne la nécessité d’une analyse d’impact des politiques actuelles et futures de l’Union afin de déterminer comment elles peuvent mieux soutenir la sécurité et la défense de l’Union, y compris au moyen d’autres objectifs stratégiques de l’Union, en particulier la transition vers une économie verte, numérique et juste;
16.affirme que des changements géopolitiques majeurs, amplifiés par le retour de guerres à grande échelle dans notre voisinage, ont menacé et continuent de menacer la sécurité de l’Union et de ses citoyens, que le statu quo n’est pas envisageable et que, pour faire face aux menaces, l’Union et ses États membres doivent ériger en règle la coopération de leurs forces armées et de leur industrie de la défense au niveau de l’Union, afin de créer une union de la défense européenne fondée sur les capacités, qui soit en mesure de surmonter les menaces et les attaques contre la sécurité de l’Union;
17.est fermement convaincu que des progrès plus substantiels doivent être accomplis dans la mise en œuvre de l’article 42, paragraphe 7, du traité UE et qu’un plan est nécessaire pour mettre en œuvre cette politique de solidarité dans le livre blanc en ce qui concerne le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres;
18.insiste sur la nécessité d’améliorer la coopération et la coordination en faisant le point sur la volonté de l’Union et du Royaume-Uni de devenir des partenaires de sécurité plus proches; demande instamment la création d’un Conseil européen de sécurité chargé de coordonner les actions entre les pays partageant les mêmes valeurs et désireux de jouer un rôle de premier plan dans la coopération et l’intégration européennes en matière de défense; demande que ce Conseil européen de la sécurité serve de base à une nouvelle union européenne de la défense, réunissant des États membres partageant les mêmes valeurs et des partenaires stratégiques partageant une vision commune en matière de sécurité et une confiance mutuelle;
19.estime que les documents stratégiques actuels, les propositions législatives et les études telles que la boussole stratégique, la stratégie industrielle de défense européenne et le rapport Niinistö devraient enfin inspirer une vision concrète et globale de l’avenir de la défense européenne, y compris des finalités, des objectifs et des feuilles de route spécifiques, que le livre blanc devrait constituer;
20.demande à l’Union de mieux relier les instruments de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC) aux instruments de sécurité intérieure et de renforcer la coopération sur les biens à double usage et la coopération civilo-militaire au niveau de l’Union;
21.soutient fermement les nombreuses bonnes recommandations formulées dans le rapport Niinistö; soutient pleinement l’objectif du rapport de «ne pas limiter notre niveau de préparation à ce qui est aisé à obtenir politiquement», mais de répondre aux besoins pour faire face aux scénarios les plus graves; insiste sur l’importance de la future stratégie de préparation de l’Union pour mettre l’Union sur la voie d’une préparation globale, y compris une définition des fonctions sociétales et gouvernementales vitales au niveau de l’Union, l’élaboration d’exigences de base en matière de préparation au niveau de l’Union pour ces fonctions, et la garantie de la cohérence des plans sectoriels de crise au niveau de l’Union; met en avant, en particulier, les recommandations du rapport Niinistö visant à donner aux citoyens les moyens de concrétiser la résilience de la société, en s’inspirant du concept finlandais de défense totale;
22.invite l’Union à élaborer une évaluation des risques de l’Union afin de recenser les menaces transsectorielles et les risques auxquels l’Union dans son ensemble est confrontée, et soutient l’intégration du principe de «préparation dès la conception» dans l’ensemble de l’Union; insiste sur la nécessité d’élaborer un «contrôle de sécurité et de préparation» obligatoire pour les futures analyses d’impact et des «tests de résistance» pour la législation actuelle, comme proposé par le rapport Niinistö; estime qu’il est nécessaire d’évaluer s’il existe des difficultés spécifiques qui compromettent l’achèvement en temps utile des projets jugés essentiels pour une dissuasion militaire efficace et l’arrivée rapide de capacités sur le flanc oriental pour les situations d’urgence militaire;
23.invite la Commission et les États membres à étudier la faisabilité d’un acte de préparation de l’Union afin d’aligner, dans la mesure du possible, les efforts de l’Union et des États membres;
24.invite l’Union et les États membres à mettre en place et à mener un exercice de préparation complet de l’Union afin de tester la prise de décision à haut niveau et la coordination opérationnelle;
25.demande que la PSDC soit guidée par une approche de sécurité humaine et adhère au programme en faveur des femmes, de la paix et de la sécurité; souligne l’importance d’autres cadres multilatéraux qui s’efforcent de construire un avenir pacifique et stable;
26.invite les États membres à plaider en faveur de la suppression de la règle de l’unanimité en matière de politique étrangère et de sécurité au sein du Conseil; demande une modification de l’article 46, paragraphe 6, du traité UE afin de permettre le vote à la majorité qualifiée au lieu de l’unanimité dans la gestion de la coopération structurée permanente, à l’exception des décisions conduisant à la création de missions ou d’opérations militaires dotées d’un mandat exécutif dans le cadre de la PSDC, qui doivent continuer à relever de l’unanimité;
27.propose de renforcer le rôle de surveillance et de contrôle du Parlement conformément à l’élargissement du rôle de l’Union dans le domaine de la défense, y compris au moyen d’actes délégués pour les programmes de travail des programmes et instruments industriels de défense actuels et futurs qui permettraient de contrôler leur mise en œuvre, en particulier les priorités fixées par la Commission en ce qui concerne les projets relatifs aux capacités prioritaires; demande qu’un représentant du Parlement soit nommé au nouveau conseil de préparation industrielle dans le domaine de la défense proposé dans l’EDIP, où aucun représentant n’est actuellement prévu;
28.estime que l’Union doit comprendre clairement quel est l’écart réel entre les objectifs en matière de capacités et les capacités de défense des États membres; souligne la nécessité d’accroître la production de l’industrie de la défense et de disposer d’unités de production toujours prêtes pour répondre aux attaques étrangères ou aux besoins spécifiques de ses partenaires stratégiques;
29.estime que des analyses régulières des menaces sont une nécessité absolue et propose de synchroniser leur cycle de planification avec des analyses régulières similaires des menaces au sein de l’OTAN et par les principaux partenaires non membres de l’OTAN;
30.renouvelle son appel à renforcer la coopération entre l’Union et l’OTAN afin de construire une OTAN plus européenne, notamment en alignant pleinement la boussole stratégique de l’Union et le concept stratégique de l’OTAN, le plan de développement des capacités de l’Union et les objectifs en matière de capacités du processus de planification de la défense de l’OTAN, sauf dans les domaines où il existe des intérêts particuliers évidents pour l’Union uniquement; propose la nomination d’un représentant permanent de l’Union à l’OTAN, y compris au comité militaire sur l’échange d’informations et les opérations militaires respectives;
31.demande à l’Union de pallier les lacunes et les insuffisances critiques en matière de capacités de défense et de concentrer ses efforts sur des projets spécifiques d’intérêt européen commun qui sont trop coûteux pour que des États membres puissent réaliser les acquisitions à titre individuel, en particulier concernant des capacités de soutien stratégiques, mais aussi d’importants stocks d’équipements critiques, afin d’apporter une véritable valeur ajoutée européenne, avec des achats et une gestion plus efficaces au moyen d’un cadre de l’Union grâce à un instrument spécial hors budget; propose, en particulier, de mettre en place les capacités suivantes:
a)systèmes intégrés de défense aérienne et de frappe à longue distance, de manière optimale en coordonnant le développement en cours de l’initiative du bouclier aérien européen (ESSI) avec l’approche européenne sur les frappes de longue portée (ELSA),
b)neutralisation de la défense aérienne ennemie (SEAD),
c)force de drones multitypes (RPAS),
d)guerre électronique
e)cybersystèmes défensifs et offensifs,
f)AWACS, avitaillement en vol et transport de longue distance,
g)capacités de commandement, de contrôle, de communication et d’informatique (C4) et capacités de renseignement, de surveillance et de reconnaissance (ISR) et moyens spatiaux essentiels pour l’alerte précoce, la navigation, l’observation et la communication,
h)système de combat terrestre principal (SCTP),
i)système de combat aérien du futur (SCAF);
32.invite instamment l’Union et les États membres à passer d’une approche fondée sur les flux à une approche fondée sur les stocks, assortie d’objectifs contraignants pour les équipements de défense critiques; souligne la nécessité de garantir une fourniture durable sur les plans social et environnemental des matières premières nécessaires et de mettre en œuvre des politiques visant à combler les lacunes dans la production et sur le marché du travail; souligne qu’il est urgent de veiller à ce que la production et le stockage de munitions et d’autres produits dans le domaine de la défense correspondent mieux aux exigences de sécurité, en élaborant des plans sur la manière de disposer d’un réseau plus décentralisé et plus résilient et de stocks communs s’appuyant sur des «réserves de préparation» dans les régions confrontées à un niveau de menace plus élevé et sur la possibilité d’une guerre conventionnelle à grande échelle;
33.demande à l’Union d’adapter d’urgence ses outils aux nouvelles réalités en concevant une capacité administrative permettant d’agir beaucoup plus rapidement face à des guerres ou à d’autres crises de grande ampleur; souligne que cet objectif peut être réalisé en élaborant et en mettant en place des règles contraignantes, auxquelles il est possible de recourir en cas d’urgence afin d’accélérer les procédures administratives et juridiques, et en prenant des mesures en amont de la chaîne d’approvisionnement, en vue de la production et de la livraison rapides de biens militaires ou de la construction de projets d’infrastructure pour la mobilité européenne, considérés comme essentiels pour la défense;
34.demande instamment à l’Union de prendre des mesures immédiates pour mettre en commun les ressources et l’expertise dans le domaine de la cybersécurité, en reconnaissant que les différents États membres sont confrontés à des capacités limitées dans ce domaine; plaide fermement en faveur de l’élaboration d’une approche européenne unifiée des cyberforces; insiste en outre sur la création rapide de cybercapacités européennes communes afin de relever efficacement les défis communs auxquels sont confrontés tous les États membres dans le paysage des menaces en évolution rapide, renforçant ainsi la résilience collective et l’autonomie stratégique de l’Union dans le domaine numérique;
35.demande à l’Union d’utiliser le livre blanc pour décrire un plan qui contribue à supprimer les obstacles réglementaires nationaux inutiles freinant la mobilité militaire, sans porter atteinte à la sécurité publique; estime que la définition de la mobilité militaire doit s’appliquer aux infrastructures à double usage qui couvrent tous les aspects logistiques de la mobilité et que, pour les projets à double usage, des critères adéquats devraient être correctement appliqués en ce qui concerne les dispositions de financement, en particulier au niveau de l’Union; insiste sur la nécessité d’investissements importants dans les infrastructures de mobilité militaire afin de renforcer les capacités de transport aérien de fret, les camps, les dépôts, les ports, les plateformes de transport aérien, maritime et ferroviaire, les lignes ferroviaires, les voies navigables, les routes et les ponts;
36.réaffirme souscrire sans réserve à la CDR afin qu’elle atteigne sa pleine capacité opérationnelle au plus tard à la mi-2025, avec un contingent d’au moins 5000militaires chargés de mener à bien des missions de sauvetage et d’évacuation et des opérations de première entrée et de stabilisation, ou encore d’apporter un renfort temporaire à des missions; propose de moderniser la CDR et d’en faire une force multinationale permanente dotée de ses propres moyens stratégiques et de ses propres dispositifs de commandement et de contrôle, en s’appuyant sur l’échec de l’expérience des groupements tactiques adhoc de l’Union;
37.invite la vice-présidente/haute représentante à engager un dialogue avec les États membres en vue de créer de nouvelles unités multinationales permanentes conçues pour répondre aux menaces en constante évolution auxquelles l’Union est confrontée depuis la décision de créer la RDC, en particulier à la lumière du récent rapprochement de Donald Trump avec Vladimir Poutine et des déclarations concernant le Groenland, qui renforcent l’urgence d’une dissuasion et d’une défense européennes robustes pour anticiper les scénarios militaires les plus critiques;
38.suggère de transformer l’actuel Eurocorps en un corps multinational renforcé, disposant de ses propres capacités stratégiques ainsi que de systèmes de commandement et de contrôle autonomes, avec la possibilité d’y intégrer de manière permanente des brigades nationales équipées de matériel standardisé et acquis conjointement; met en avant qu’un corps multinational européen de ce type pourrait aider les petits États membres à atteindre leurs objectifs actuels en matière de constitution de forces, offrir à l’industrie une demande unifiée grâce à des commandes d’équipements standardisés et massifs, et renforcer la capacité de l’Union en matière de dissuasion et de défense, y compris pour les pays candidats;
39.suggère de mettre en place, à l’échelle de l’Union, des capacités de soutien stratégiques avec un équipage et une gestion partagés, inspirés du modèle des AWACS de l’OTAN, dont le coût élevé dépasse les capacités individuelles des États membres, mais qui sont essentiels pour la sécurité globale de l’Union;
40.exige que le commandement européen du transport aérien soit transformé en une «flotte aérienne de l’Union pour la gestion des crises», composée d’avions de transport militaire détenus au niveau européen et mis à disposition des États membres pour le déploiement d’équipements ou de troupes, les évacuations d’urgence ou les missions de sécurité civile;
41.exige à nouveau que la capacité militaire de planification et de conduite (MPCC) soit dotée d’infrastructures et de personnel appropriés, ainsi que d’une planification, d’un commandement et d’un contrôle renforcés, et de systèmes d’information et de communication efficaces;
42.exige qu’un concept plus ambitieux de formation militaire et d’éléments clés de planification, de commandement et de contrôle au niveau de l’Union soient intégrés dans le plan d’action du livre blanc, notamment par la mise en place d’une MPCC pleinement équipée et dotée d’effectifs suffisants; considère que l’Union devrait intensifier la formation des forces ukrainiennes en fonction de leurs besoins spécifiques, afin de renforcer la coordination opérationnelle entre les unités, d’optimiser la constitution de forces et de créer les conditions nécessaires pour que les forces armées européennes puissent en tirer des enseignements;
43.invite instamment les États membres de l’Union à se mettre d’accord sur une vision unifiée et claire à moyen et à long terme pour l’industrie européenne de la défense, afin de contribuer à la réalisation des grands objectifs en matière de capacités;
44.souligne qu’il est urgent de modifier la manière dont les programmes industriels de défense sont mis en œuvre dans l’ensemble de l’Union; considère qu’il est essentiel de synchroniser les programmes de travail avec les grands objectifs révisés, afin de se concentrer sur les lacunes capacitaires les plus urgentes et les plus importantes sur le plan militaire; met en avant l’importance de surmonter la dispersion excessive des ressources financières limitées et souligne qu’il est nécessaire d’éviter tout nouveau «double approvisionnement» ou tout double emploi similaire au niveau de l’Union, qui aggraverait le nombre élevé de doubles emplois en Europe et le faible taux d’efficacité de la base industrielle de défense, caractérisée par une fragmentation persistante;
45.insiste sur la nécessité d’augmenter les capacités et les ressources, et de surmonter la fragmentation du marché de la défense en créant un marché unique de la défense, où des règles communes contraignantes assurent une concurrence loyale et une interopérabilité totale des produits de défense; partage le point de vue exprimé dans le rapport de Mario Draghi sur l’avenir de la compétitivité européenne, selon lequel l’Union doit de toute urgence renforcer la compétitivité du secteur de la défense par divers moyens, tels que des fusions inspirées par les meilleures pratiques (comme celle d’Airbus) et une concurrence accrue entre les entreprises de défense traditionnellement ancrées au niveau national, et décider des mesures d’incitation destinées à l’industrie de la défense de l’Union, afin d’attirer des investissements publics et privés suffisamment importants dans la sécurité et la défense;
46.considère que le livre blanc devrait s’appuyer sur la stratégie industrielle de défense européenne (SEAD), notamment le programme pour l’industrie européenne de la défense, élaborer un concept de plan d’urgence pour la coopération économique en temps de guerre afin de se préparer à un soutien mutuel en cas de crises de sécurité à grande échelle, et approfondir la communication économique en temps de guerre afin de fournir des alertes précoces face aux menaces dures, hybrides et informatiques;
47.insiste sur la nécessité d’un marché unique européen de la défense, car la fragmentation actuelle et le manque de compétitivité entravent la capacité de l’Union à assumer davantage de responsabilités en tant que garant de la sécurité; déplore que ni les programmes industriels de défense de l’Union ni l’augmentation des budgets nationaux de défense n’aient conduit à une augmentation significative de la coopération industrielle dans le domaine de la défense au niveau de l’Union, qui aurait permis aux États membres d’atteindre leurs propres objectifs de coopération fixés pour2007, tels que définis dans le cadre de l’Agence européenne de défense (AED); rappelle le faible niveau persistant de collaboration européenne depuis le 24février2022, qui était de 14% pour la recherche et le développement (R&D) en2022 avant de chuter à 6% en2023, et de 18% pour la passation conjointe de marchés en2023, sachant que l’AED n’a pas fourni de données spécifiques pour2023, mais a mentionné un «ralentissement temporaire» dans ces efforts; insiste sur l’urgence d’analyser les raisons de la réticence des États membres à privilégier la coopération au niveau de l’Union et à la considérer comme le principal outil d’investissement dans le domaine de la défense;
48.soutient fermement l’idée de faire de la coopération au niveau de l’Union la règle dans le secteur industriel européen de la défense et de s’engager à atteindre des objectifs chiffrés concrets en matière de coopération, comme ceux présentés dans la SEAD, qui se concentrent en particulier sur les passations de marchés publics conjointes (au moins 40% d’ici2030), les échanges commerciaux intra-UE (au moins 35% d’ici2030) et les passations de marchés publics pour des produits de défense fabriqués dans l’Union (au moins 50% d’ici2030 et 60% d’ici2035);
49.prie instamment la Commission et le Conseil de relever le double défi de la production conjointe d’équipements militaires et de leur utilisation effective dans tous les États membres; appelle de ses vœux l’élaboration d’une stratégie globale visant à renforcer l’interopérabilité en promouvant des normes civiles et militaires harmonisées, telles que les accords de normalisation de l’OTAN, dans le cadre des programmes industriels de défense de l’Union; exige un engagement à conditionner le financement des instruments actuels et futurs à la normalisation et à la convergence de la certification par les États membres de l’OTAN, ainsi qu’à préciser davantage les normes actuelles; invite la Commission à présenter des plans concrets pour surmonter les obstacles à l’interopérabilité et garantir l’utilisation efficace des équipements produits conjointement par tous les États membres participants;
50.insiste sur l’importance des projets de défense européens d’intérêt commun présentés dans le programme pour l’industrie européenne de la défense, qui sont essentiels à la préparation et au renforcement de la défense européenne; estime que ces projets devraient soutenir les capacités industrielles et technologiques qui sous-tendent les priorités communes en matière de capacités et qui ne peuvent être mises en œuvre seules, telles que les capacités de soutien stratégiques; propose que, sur la base des grands objectifs en matière de capacités, le commissaire à la défense établisse un «plan de production» clair qui énumère des objectifs quantifiés pertinents non seulement pour les capacités de soutien stratégiques, mais aussi pour les besoins les plus critiques en matière d’équipements à grande échelle, tels que le SCTP, le SCAF, l’ESSI et l’ELSA, qui seraient ensuite acquis et maintenus conjointement tout au long de leur cycle de vie afin de réaliser des économies d’échelle et d’assurer l’interopérabilité de la manière la plus efficace et la plus rapide possible;
51.considère qu’une industrie européenne de la défense compétitive et résiliente entraînera une restructuration du paysage industriel, notamment par des fusions, ce qui réduira le nombre de programmes parallèles qui gaspillent des ressources financières, ainsi qu’une meilleure répartition régionale des sites de production; estime que nos politiques de défense devraient encourager la croissance des centres d’excellence de l’Union, en tenant compte des critères de décentralisation, de sécurité et de résilience; insiste sur la nécessité de stimuler massivement les jeunes pousses, les entreprises en expansion et les PME dans le secteur de la défense, en les considérant comme une priorité et un élément structurel clé de la section du livre blanc consacrée au marché unique de la défense; souligne que, pour les acteurs bien établis ou systémiques du secteur de la défense, les investissements publics devraient être assortis de garanties supplémentaires pour assurer que les fonds publics sont réinvestis et non utilisés uniquement pour générer des bénéfices pour leurs actionnaires, par exemple grâce à des impôts sur les bénéfices exceptionnels;
52.propose de créer des groupements régionaux européens de la base industrielle et technologique de défense européenne, regroupant les installations de recherche, de développement, de production et d’entretien afin de créer des économies d’échelle régionales et de développer des domaines prioritaires de spécialisation technologique; exige que ces grappes d’entreprises soient réparties de manière stratégique à travers l’ensemble de l’Union, afin de permettre la continuité de l’industrie manufacturière en temps de crise et de répartir plus équitablement les perspectives économiques pour les PME et les États membres dont les industries de la défense sont relativement petites; exige que ces pôles soient alignés sur la proposition de programme pour l’industrie européenne de la défense, notamment en ce qui concerne la structure pour le programme européen d’armement;
53.exige une plus grande cohérence dans le soutien aux entreprises en réduisant les charges administratives superflues et les formalités bureaucratiques, et en garantissant un accès beaucoup plus aisé des petites et moyennes entreprises dans le secteur de la défense;
54.appelle de ses vœux l’élaboration d’une stratégie globale visant à tirer parti des instruments actuels, tels que le mécanisme de fonds propres pour la défense, ainsi que de nouvelles initiatives comme le fonds du programme pour l’industrie européenne de la défense pour l’accélération de la transformation des chaînes d’approvisionnement dans le secteur de la défense; exige que des engagements concrets soient pris pour augmenter le montant du financement par PME, tout en garantissant la transparence et l’obligation de rendre des comptes; demande la mise en place de mécanismes de contrôle robustes pour s’assurer que les fonds encouragent l’innovation et la compétitivité des PME sans créer de distorsions de marché; exige, en outre, des rapports réguliers sur l’incidence et l’efficacité de ces instruments financiers pour soutenir les jeunes pousses et les PME dans l’industrie de la défense et dans le secteur du double usage;
55.invite la Commission à concevoir un successeur du fonds européen de la défense (FED) qui soutienne la recherche et l’innovation communes tout au long de la chaîne d’approvisionnement et qui crée les conditions nécessaires pour relever les défis technologiques et apporter des solutions européennes aux principales lacunes en matière de capacités; exige la création d’une agence de la Commission qui se concentre particulièrement sur la R&D présentant un double usage potentiel, en s’inspirant de l’Agence américaine des projets de recherche avancée en matière de défense; souligne la nécessité de soutenir résolument au niveau de l’Union les technologies les plus radicales et innovantes par la création d’une plateforme d’accélérateurs pour la recherche, le développement et l’expérimentation de nouvelles technologies de défense de pointe, ce qui contribuerait également à la compétitivité économique, en réunissant l’industrie, les gouvernements et la communauté d’experts; souligne que cette organisation devrait favoriser une culture de la prise de risque et être très flexible dès la conception; propose, dans un premier temps, que l’allocation des fonds se concentre sur un nombre limité de projets critiques, y compris des capacités de défense décarbonées et de nouvelles capacités de dissuasion;
56.souhaite que le successeur du FED renforce la résilience énergétique et intègre la transition climatique et environnementale, mais aussi qu’il tienne compte des enjeux climatiques et de la décarbonation (couvrant à la fois l’adaptation et l’atténuation) de la défense de l’Union dès la conception et dans les cinq dimensions suivantes: opérationnelle, planification et développement des capacités, engagement multipartite, gouvernance et R&D, afin d’améliorer les performances des capacités militaires, la résilience des forces armées et, par conséquent, la compétitivité de la BITD européenne.
57.est profondément convaincu que les instruments au niveau de l’Union devraient donner la priorité et accroître massivement le soutien aux PME et aux jeunes pousses dans le secteur des biens à double usage et de la défense; souligne la nécessité d’aider ces entreprises à lancer sur le marché des prototypes testés avec succès, notamment par l’intensification de la production; souligne la nécessité de combler le déficit de financement actuel pour ces mesures importantes qui renforceraient la BITD européenne, notamment en collaboration étroite avec la base industrielle de technologie et de défense ukrainienne;
58.insiste sur la nécessité de supprimer les obstacles à l’entrée sur le marché des produits de défense dans l’ensemble de l’Union en révisant les directives relatives au transfert de produits liés à la défense et aux marchés publics dans le domaine de la défense; invite la Commission à proposer des mesures visant à améliorer l’accès au marché, faciliter la coopération transfrontalière et renforcer la sécurité de l’approvisionnement, notamment en harmonisant les politiques nationales d’exportation;
59.insiste sur la nécessité d’élaborer une politique d’armement efficace au niveau de l’Union, incluant une dimension opérationnelle et efficace du commerce extérieur, qui vise à soutenir les partenaires confrontés à des menaces émanant de régimes autoritaires agressifs, tout en empêchant les livraisons d’armes à des régimes non démocratiques agressifs et à ceux qui utilisent les armes de manière illégale, conformément au droit international relatif aux droits de l’homme et au droit humanitaire, comme le prévoient les huit critères de la position commune du Conseil sur les exportations d’armes[2]; souligne qu’il est également essentiel de surmonter l’interprétation très étroite et nationale de l’article346 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (traité FUE) à cet égard;
60.invite les États membres à participer activement à un mécanisme de hiérarchisation des priorités pour la production de défense qui s’appuie sur la cartographie des capacités de sécurité et de défense, afin de hiérarchiser efficacement les commandes, les contrats et le recrutement d’employés dans les situations d’urgence;
61.est fermement convaincu que la préférence européenne doit être la pierre angulaire des politiques de l’Union liées au marché européen de la défense, en tant qu’impératif stratégique pour protéger le savoir-faire européen; insiste pour que le principe de la préférence européenne se reflète dans les règlements de l’Union en matière de défense par des critères d’éligibilité clairs et sans ambiguïté; souligne toutefois qu’il est nécessaire d’intégrer des exceptions pour les situations d’urgence militaire imprévue et les projets essentiels à la préparation en matière de défense dans ces critères;
62.exige la mise en place d’un instrument de réaction aux crises pour garantir la souveraineté européenne, inspiré du modèle de la loi américaine sur la production de défense, afin que l’Union dispose d’un outil qui puisse être activé pour réagir rapidement aux besoins d’urgence en temps de guerre ou de crise; demande que cet outil prévoie:
a)d’acquérir conjointement des produits de défense spécifiques,
b)de donner la priorité à la fourniture de matériaux critiques et aux commandes pour des chaînes d’approvisionnement spécifiques, comme les munitions d’artillerie,
c)d’accélérer les procédures administratives et juridiques pour le déplacement d’équipements et de troupes militaires et, dans la mesure du possible, pour la construction de projets (d’infrastructures) essentiels à la mobilité militaire ou d’autres domaines prioritaires de préparation militaire, tout en respectant les normes environnementales et en mettant en place les garanties nécessaires;
63.déplore le manque de volonté des États membres d’investir dans la coopération au niveau de l’Union et les exhorte à atteindre les objectifs de sécurité et de défense de l’Union; souligne que le coût de l’absence de préparation face aux imprévus militaires les plus extrêmes serait bien supérieur au coût d’une préparation décisive de l’Union; rappelle que les dépenses globales de défense de l’Union sont insuffisantes et que très peu de dépenses nationales sont coordonnées, mises en commun avec d’autres États membres, ou investies dans des projets de collaboration européens; invite l’Union et les États membres à travailler ensemble pour convenir de mesures et de moyens concrets pour les investissements publics et privés à court et à long terme;
64.relève que, selon la présidente de la Commission, le déficit de dépenses dans le domaine de la défense s’élève actuellement à 500milliards d’euros pour la prochaine décennie, mais que, si l’Union doit développer ses propres capacités militaires, les experts estiment que ce montant devra augmenter de manière significative; souligne que le budget de l’Union ne peut pas combler ce déficit à lui seul, mais qu’il a un rôle important à jouer;
65.souligne que l’augmentation des investissements dans le domaine de la défense ne devrait pas entrer en concurrence avec d’autres priorités d’investissement public, notamment les dépenses sociales, la cohésion territoriale et la transition climatique, qui sont toutes pertinentes pour notre sécurité européenne; rappelle que le moyen le plus efficace de maintenir ces priorités est de débloquer de nouveaux investissements en faveur de la défense plutôt que de réaffecter des fonds déjà alloués; rappelle en outre que les orientations en matière de financement devraient être ancrées dans une approche de la résilience qui concerne l’ensemble de la société, qu’elles doivent par conséquent être largement soutenues par les citoyens européens, et que ce soutien doit être durable à long terme;
66.s’oppose à toute proposition visant à réaffecter les fonds de la politique de cohésion de leurs objectifs à long terme et rappelle que seul le renforcement du tissu social et économique de l’Europe et la réduction des disparités territoriales contribueront au développement équilibré et à la stabilité de toutes les régions de l’Union et, à terme, renforceront la capacité de l’Union à se défendre contre la désinformation et l’influence étrangère;
67.soutient l’annonce de la présidente de la Commission de créer un nouvel instrument financier de l’Union pour aider les États membres à augmenter leurs dépenses de défense grâce à des prêts soutenus par le budget de l’Union; prend acte de l’intention de mettre en place ce nouvel instrument au titre de l’article122 du traitéFUE; rappelle que des instruments similaires, comme le programme de relance, qui a alloué des ressources sous forme de prêts à divers programmes de l’Union, ont été établis par un règlement du Conseil en vertu de l’article122, mais que d’autres programmes auxquels les ressources ont été allouées, comme la facilité pour la reprise et la résilience, ont été adoptés par la procédure de codécision basée sur l’article175 invite la Commission à adopter une structure juridique similaire pour tout nouvel instrument de financement de la défense, en respectant la procédure législative ordinaire et en garantissant la légitimité démocratique de ces initiatives;
68.salue l’extension des critères d’éligibilité du groupe de la Banque européenne d’investissement (BEI) aux biens à double usage; salue l’initiative stratégique européenne en matière de sécurité lancée en2022 par le groupe de la BEI, qui vise à soutenir l’innovation dans le domaine des technologies à double usage; souligne que les investissements de la BEI devraient se concentrer sur des projets innovants, mais pas sur des produits consommables tels que les munitions; souligne qu’une augmentation des investissements de la BEI dans le secteur de la défense peut encourager les investissements de banques commerciales dans ce secteur; invite le groupe de la BEI à procéder à un examen de l’incidence de l’extension de sa politique en matière de biens à double usage et insiste sur le fait que toute nouvelle extension des prêts dans ce secteur ne devrait se faire que si elle n’a pas d’effets négatifs sur les coûts de financement globaux de la banque ou sur sa réserve d’investissement, ni sur la contribution au financement des investissements nécessaires pour permettre à l’Union d’atteindre ses objectifs climatiques;
69.estime que, en complément de la dette conjointe, les prêts liés au secteur de la défense devraient être gérés par une entité bancaire distincte, étant donné que les investissements dans la défense ne peuvent, en principe, être assimilés à des investissements relevant des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance; invite dès lors la Commission et les États membres à créer d’urgence une nouvelle banque dédiée à la défense, inspirée du modèle de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, afin de traiter de manière globale les financements dans le domaine de la défense, tout en préservant les autres investissements et en permettant aux alliés d’y participer.
70.prend acte de l’annonce de la présidente de la Commission relative à l’activation de la clause dérogatoire pour les investissements dans le domaine de la défense; souligne que, compte tenu d’autres priorités politiques urgentes, la clause dérogatoire doit être mise en œuvre de manière à assurer que l’augmentation des dépenses de défense de défense n’entraîne pas de réductions dans d’autres domaines et qu’elle doit être conditionnée au développement de projets communs de l’Union, y compris des infrastructures à double usage telles que les chemins de fer, les systèmes satellitaires et les réseaux électriques résilients;
71.met en évidence que le contexte politique actuel démontre que le cadre de gouvernance économique récemment adopté par l’Union limite les ressources financières des gouvernements, les empêchant de répondre efficacement aux défis actuels et émergents; souligne que privilégier un domaine d’action au détriment d’un autre exacerbe plutôt qu’il ne résout les multiples crises auxquelles l’Union est confrontée; appelle à une révision du cadre des règles budgétaires de l’Union afin de garantir une sécurité de financement à long terme, essentielle pour soutenir les investissements dans la transition juste, le renforcement des capacités de production de défense européennes et le développement d’infrastructures à double usage, permettant ainsi une approche véritablement coordonnée de la politique d’investissement au niveau de l’Union;
72.souligne que les besoins urgents ne peuvent être différés jusqu’au prochain cadre financier pluriannuel (CFP); estime que, tant que les États membres refusent d’allouer davantage de ressources à un budget global de l’Union plus élevé, y compris la création de nouvelles ressources propres, et compte tenu de l’exigence d’unanimité pour modifier à la fois le règlement CFP[3] et la décision du Conseil relative aux ressources propres[4], il est impératif d’envisager sans tarder des solutions de financement alternatives, notamment:
a)le lancement urgent d’une discussion en vue de mettre en place une autre facilité financière hors budget[5] qui permettrait de mutualiser et d’européaniser suffisamment des parties des budgets nationaux de défense au niveau de l’Union, en couvrant l’ensemble du cycle de vie des capacités militaires, allant de la recherche et développement à la passation conjointe de marchés, en passant par la maintenance conjointe, la formation et la sécurité de l’approvisionnement, et qui serait, à l’instar de l’actuelle FEP hors budget, ouverte à des pays tiers tels que la Norvège et le Royaume-Uni; souligne dès lors la nécessité d’améliorer les procédures de prise de décision et de surveillance par rapport au modèle de gouvernance actuel de la FEP;
b)l’émission par la Commission de garanties de risque de l’Union pour réduire les taux d’intérêt des participants à des projets jugés essentiels pour la préparation en matière de défense au niveau de l’Union,
c)la mise en place d’un nouveau programme de dette de l’Union, inspiré du modèle de NextGenerationEU, soutenu par de véritables ressources propres pour rembourser les fonds empruntés,
d)la création de nouvelles ressources propres authentiques pour générer des flux de revenus supplémentaires destinés à financer des investissements en matière de sécurité et de défense au niveau européen,
e)une mobilisation accrue de fonds propres et de capitaux privés; réaffirme à cet égard l’importance d’encourager davantage d’investissements privés dans la défense de l’Union,
f)le développement de produits financiers spécifiques visant à inciter les banques privées à investir davantage dans le secteur de la défense,
g)l’élaboration de procédures d’urgence pour les projets mis en place en réponse à des crises ou guerres majeures;
73.estime que le prochain CFP devrait allouer davantage de fonds à la sécurité commune et être plus flexible pour répondre efficacement aux crises imprévues et aux situations d’urgence;
74.se félicite des propositions formulées dans le récent rapport Niinistö en ce qui concerne le financement de la défense européenne; soutient l’établissement d’une facilité de défense européenne et d’une facilité pour la sécurisation de l’Europe; apprécie et soutient également la proposition de créer un programme de garantie des investissements inspiré du modèle d’InvestEU, doté d’une architecture ouverte, afin de dynamiser les investissements du secteur privé et de promouvoir une «norme européenne en matière d’obligations de préparation»;
75.insiste sur la nécessité de mettre en place des mécanismes solides pour assurer une utilisation efficace des ressources limitées du budget de l’Union et éviter toute duplication des efforts dans les projets de défense; demande un réexamen approfondi des procédures de surveillance actuelles et l’établissement d’un cadre transparent pour le suivi et l’évaluation de l’efficacité des initiatives de défense financées par l’Union;
76.charge sa Présidente de transmettre la présente résolution au commissaire à la défense et à l’espace, à la vice-présidente de la Commission/haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au Conseil et à la Commission.
- [1] JOC493 du 27.12.2022, p.136.
- [2] Position commune 2008/944/PESC du Conseil du 8 décembre 2008 définissant des règles communes régissant le contrôle des exportations de technologie et d’équipements militaires (JO L 335 du 13.12.2008, p. 99, ELI: http://data.europa.eu/eli/compos/2008/944/oj.)
- [3] Règlement (UE, Euratom) 2020/2093 du Conseil du 17décembre 2020 fixant le cadre financier pluriannuel pour les années 2021 à 2027 (JO L433I du 22.12.2020, p.11, ELI: http://data.europa.eu/eli/reg/2020/2093/oj.
- [4] Décision (UE, Euratom) 2020/2053 du Conseil du 14décembre2020 relative au système des ressources propres de l’Union européenne et abrogeant la décision2014/335/UE, Euratom, JOL424 du 15.12.2020, p.1, ELI: http://data.europa.eu/eli/dec/2020/2053/oj.
- [5] Conformément au point1m) de sa recommandation du8juin2022 au Conseil et au vice-président de la Commission/haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité sur la politique étrangère, de sécurité et de défense de l’Union européenne après la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine (JOC 493, 27.12.2022, p.136).